Avis n° 04-2006 du Conseil constitutionnel concernant un projet de loi modifiant et complétant la loi n° 58-90 du 19 septembre 1958 portant création et organisation de la Banque centrale de Tunisie
Vu la Constitution et notamment ses articles 34, 35 et 72,
Vu la loi organique n°2004-52 du 12 juillet 2004 relative au Conseil constitutionnel,
Vu le projet de loi modifiant et complétant la loi n° 58-90 du 19 septembre 1958 portant création et organisation de la Banque centrale de Tunisie,
Vu sa décision de proroger le délai de consultation, en application de l'article 21 de la loi organique n° 2004-52 précitée,
Vu le rapport relatif au projet soumis,
Après délibération,
I- Sur la saisine du Conseil :
Considérant que le projet soumis a pour objet de modifier et de compléter la loi n° 58-90 du 19 septembre 1958 portant création et organisation de la Banque centrale de Tunisie;
Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la Constitution, le Conseil constitutionnel examine les projets de loi qui lui sont soumis par le Président de la République quant à leur conformité ou leur compatibilité avec la Constitution et la saisine du Conseil est obligatoire pour les projets de loi relatifs aux obligations et à la procédure devant les différents ordres de juridictions;
Considérant que les modifications et la loi objet de la modification comprennent des dispositions ayant trait aux obligations et à la procédure devant les tribunaux;
Considérant que le projet soumis s'insère, eu égard à son objet, dans le cadre de la saisine obligatoire;
II- Sur le fond:
Considérant que le projet soumis comprend, notamment, des dispositions visant à:
- promouvoir la structure et le rôle de la Banque centrale,
- consolider la stabilité financière,
- assurer le contrôle de la circulation monétaire ainsi qu'à superviser les établissements de crédit,
- améliorer le fonctionnement des systèmes de paiement et préserver la stabilité et la sécurité du système financier,
Qu'il comprend, également, des dispositions ayant trait aux
- rapports de la Banque centrale avec l'Etat, les autorités financières et les organismes de contrôle.
Considérant que le projet comprend des dispositions ayant pour objet de soumettre les comptes de la Banque centrale à un audit externe fait par deux commissaires aux comptes au lieu du censeur et de prévoir des règles garantissant leur indépendance,
Considérant que le projet prévoit également, la modification de certains termes ne correspondant pas à la législation en vigueur ;
Considérant que le projet soumis crée une structure auprès de la Banque centrale dénommée "observatoire des services bancaires" et appelée à assurer le suivi de la qualité des prestations bancaires, tout en lui conférant, à cet effet, un ensemble d'attributions;
Considérant que cet observatoire exerce son activité auprès de la Banque centrale de Tunisie qui lui réserve, sur son budget, les crédits nécessaires à l'exercice de ses missions, qu'il représente par conséquent, une structure ne bénéficiant pas de l'autonomie financière ;
Considérant que l'article 34 de la Constitution prévoit, notamment, que sont pris sous forme de lois les textes relatifs à la création des catégories d'établissements et d'entreprises publics;
Considérant que l'article 35 de la Constitution dispose, notamment, que les matières, autres que celles qui sont du domaine de la loi, relèvent du pouvoir réglementaire général;
Considérant que la loi n° 99-100 du 13 décembre 1999, telle que modifiée par la loi n° 2001-64, a créé une catégorie d'établissements publics dénommée "observatoires et centres d'information, de, formation de documentation et d'études", que la création des établissements appartenant à cette catégorie se fait, par conséquent, par décret;
Considérant que l'organe créé auprès de la Banque centrale est dénommé "observatoire", que, néanmoins, l'appellation ne constitue pas, en soi, l'un des éléments de la classification des établissements et des entreprises publics ;
Considérant qu'il ressort de ses attributions conférées à "l'observatoire des services bancaires", de sa nature et des modalités du financement de son activité que ledit observatoire n'appartient ni à la catégorie d'établissements publics en question, ni à n'importe quelle autre catégorie créée et que, par ailleurs, il ne constitue pas une nouvelle catégorie d'établissements publics;
Considérant que, pour l'ensemble de ces motifs, la création de l'observatoire des services bancaires par la loi créant et organisant la Banque centrale de Tunisie s'insère dans le cadre des missions conférées à cette institution, que sa création, ainsi prévue, est compatible avec la Constitution;
Considérant qu'il apparaît de l'étude du reste des dispositions du projet soumis qu'elles ne sont pas contraires à la Constitution et sont compatibles avec celle-ci;
III- Emet l'avis suivant :
Le projet de loi modifiant et complétant la loi n° 58-90 du 19 septembre 1958 portant création et organisation de la Banque centrale de Tunisie ne soulève aucune inconstitutionnalité.
Le mercredi 18 janvier 2006
Journal Officiel de la République Tunisienne - 19 mai 2006 Page 1335
Note: La création des établissements et entreprises publiques est l'un des domaines où le conseil a été le plus vivement sollicité avec la matière des traités internationaux.
On aurait pensé que le conseil allait ranger la création de cet observatoire dans le domaine réglementaire. Mais son avis été différent.
on note le principe selon lequel "l'appellation ne constitue pas, en soi, l'un des éléments de la classification des établissements et des entreprises publics".
Nous verrons dans d'autres cas le malaise du conseil à se faire une opinion définitive sur la question.
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